Bis repetita. Pour la cinquième année consécutive, l'Unapei lance la campagne #Jaipasécole et la plateforme www.marentree.org. La fédération dénonce à nouveau "l’insuffisance et les blocages d’accès à l’éducation pour les élèves en situation de handicap".

« Absence de place à l’école ordinaire ou dans une école spécialisée, accueil par défaut dans une structure qui ne convient pas ou plus, scolarisation inadaptée à leurs besoins ou inexistante… ». L’Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis (Unapei) relance la plateforme www.marentree.org pour permettre aux familles « de faire part de leur réalité, et de témoigner de l’injustice qu’ils vivent » encore pour la rentrée 2023.

« Cela fait cinq ans que nous avons impulsé la campagne #Jaipasécole, pour donner la parole aux parents d’enfants empêchés d’accéder à leur droit à l’éducation, et mettre en lumière les injustices que vivent ces familles. Combien de temps faudra-t-il encore attendre pour que les droits de nos enfants soient respectés ? Combien de parents épuisés devront encore témoigner avant que l’Ecole soit enfin capable de prendre en considération la diversité de tous les élèves ? A combien d’enfants refusera-t-on encore le droit de s’émanciper ? », s’insurge Luc Gateau, président de l'Unapei.

La fédération exprime, avec fermeté, son impatience devant « l’insuffisance et les blocages d’accès à l’éducation pour les élèves en situation de handicap pourtant connus de longue date… mais qui persistent ».

En cinq années, la plateforme marentrée.org a recueilli des centaines de témoignages de parents désoeuvrés exposant les obstacles rencontrées pour scolariser leur enfant en situation de handicap.

« Actuellement scolarisé depuis 2 ans dans une classe spécialisée, notre fils attend depuis 1 an sa place en IME. Après avoir été véhiculé à 30 km de la maison (mais des durées de parcours de 45 min à 1h), ce qui est très long pour un petit) nous avons enfin vu s'ouvrir ce genre de structure dans notre ville et notre fils pourra y aller dès la rentrée. Malheureusement les enseignements dispensés ne sont pas encore suffisamment adaptés au cas de notre enfant et il a vraiment besoin d'accéder à une scolarisation personnalisée au sein de l'IME afin de progresser, d'apprendre enfin à se faire comprendre de tout un chacun, à lire, à compter, à écrire. Il attend déjà depuis 1 an sa place...», témoignent, le 19 juillet, les parents de Noah, 9 ans, Allonne.

« Mon fils, 12 ans, autiste non spécifique scolarisé jusqu'à maintenant en Ulis primaire sortant du dispositif cette année. Une notification IME est faite par la MDPH mais il y a 3 ans d'attente. On me fait savoir qu'il faut l'inscrire en attendant au collège de secteur : pas AESH, rien n'est mis en place pour la rentrée. Mon fils a un niveau scolaire de début de CP, se retrouver parmi plus de 500 élèves et des cours qui ne seront pas adaptés comment faire ! Nous n'en pouvons plus, rien n'est fait pour nos enfants c'est vraiment honteux. Mon fils est pris en charge par le SESSAD depuis seulement quelques mois : j'attendais une place depuis 10 ans ! », écrit le 13 juin, la mère d'Erwan, 12 ans, Les Avenières Veyrins-Thuellin.

Selon le ministère de l'Éducation nationale, plus de 430 000 d’élèves en situation de handicap sont accueillis à l'école. L'Unapei déplore encore l'absence de chiffres fiables sur les difficultés de scolarisation des enfants en situation de handicap. « Invisibles, les enfants en situation de handicap le sont jusque dans les statistiques nationales. Impossible de savoir combien d’enfants subissent chaque année une discrimination à la scolarisation », critique l’association.

L'an dernier, la fédération a mis en place un indicateur au sein des associations de son réseau, dont elle juge des résultats sans appel.

Selon elle, à la rentrée 2022, 18% des enfants accompagnés par l’association n’avaient aucune heure d’enseignement par semaine, 33% avaient entre 0 et 6h de scolarisation par semaine, 22% avaient entre 6 et 12h, et seulement 27% bénéficiaient de 12h ou plus par semaine. Ces statistiques sont établies à partir d' un échantillon de 7 949 enfants accompagnés. « Les enfants en situation de handicap sont les premières victimes de l’absence de données sur les élèves non scolarisés ou scolarisés dans des conditions inadaptées, les parents et les aidants, en sont les victimes collatérales… », ajoute le communiqué de l'Unapei.

Pour mémoire, le Comité des droits sociaux du Conseil de l’Europe a épinglé, en avril, le non-respect par l’État Français de ses obligations envers les enfants en situation de handicap et leurs familles, après la réclamation collective déposée par l’Unapei, APF France handicap, l’Unafam et la FNATH (lire notre article). En mai, en amont de l'audition de la France par le Comité des droits de l'enfant des Nations Unies sur l'effectivité de la Convention internationale des droits de l'enfant (CIDE), Claire Hédon, la Défenseure des droits revenait, dans un rapport, sur les obstacles dans l’accès aux droits des enfants qui persistent en 2023.

A deux mois de la rentrée scolaire, Gabriel Attal, nouveau ministre de l'Éducation nationale en remplacement de Pap Ndiaye - et nouvel interlocuteur des associations du champ du handicap - devra se saisir de ce dossier de la scolarisation des élèves en situation de handicap.

Le Collectif Handicaps, association qui regroupe 52 associations nationales représentatives des personnes en situation de handicap parmi lesquelles l'Unapei, a commenté, dans un communiqué du 24 juillet, l'arrivée d'Aurore Bergé à la tête du ministère des Solidarités et des Familles, et de Fadila Khattabi en qualité de ministre déléguée aux Personnes handicapées. Il espère le nouveau gouvernement fera « du handicap un sujet fort pour le restant du quinquennat » et que « les associations seront partie prenante de toute décision concernant les citoyens qu’elles représentent. »