Quelque 208 000 victimes de violences conjugales ont été enregistrées en France en 2021 par les services de police et de gendarmerie, selon les données du service statistique du ministère de l'Intérieur (SSMSI) publiées le 15 décembre.

« Les services de sécurité ont enregistré 208 000 victimes de violences commises par leur partenaire ou ex-partenaire, soit une augmentation de 21 % par rapport à 2020 », précise l'étude, qui constate également que « le nombre d’enregistrements a pratiquement doublé depuis 2016 ».

Le ministère explique cette hausse notamment par « le contexte de libération de la parole et d’amélioration des conditions d’accueil des victimes par les services de police et de gendarmerie ». L'étude observe que « la part des faits anciens (commis avant leur année d’enregistrement) est passée de 18 % en 2016 à 28 % en 2021 ».

Près d’un tiers des victimes de violences conjugales ont subi une violence verbale ou psychologique : menaces (14 %), harcèlement moral (11 %), atteintes à la vie privée (4 %) ou injures et diffamations (1 %). La majorité des victimes sont des femmes (87 %). 89 % des mis en cause enregistrés en 2021 sont des hommes. « La moitié des victimes a entre 25 et 39 ans, les violences entre conjoints/petits-amis étant très rares chez les moins de 20 ans (5 % des victimes) et à partir de 60 ans (4 % des victimes) », indique le service statistique du ministère de l’Intérieur.

Concernant la répartition géographique de ces violences conjugales, la Guyane, la Seine-Saint-Denis, le Nord, la Réunion, le Pas-de-Calais et le Lot-et-Garonne sont les départements où le nombre de femmes victimes enregistrées pour 1 000 habitantes est le plus élevé. Globalement, la très grande majorité des victimes de violences conjugales enregistrées en 2021 sont françaises. Cependant la part de victimes étrangères (15 %) est deux fois plus élevée que la part d’étrangers vivant en France (8 %). Elle est identique pour les violences physiques, sexuelles et pour les menaces, mais est plus faible pour le harcèlement (9 %), les injures ou diffamations (9 %) et les atteintes à la vie privée (7 %), du même ordre que la part d’étrangers dans l’ensemble de la population.

Les violences conjugales enregistrées sont très rarement des violences sexuelles (4 % des victimes) : « Dans 85 % des cas, il s’agit alors d’un viol ou d’une tentative de viol ». Bien que les violences sexuelles conjugales soient encore répandues, elles restent pourtant un sujet tabou (pour rappel, la Cour de cassation a reconnu pour la première fois dans l'arrêt du 5 septembre 1990 le crime de viol entre époux).
Selon l'enquête, les violences sexuelles conjugales enregistrées croissent de 26 % : alors que les agressions sexuelles stagnent, les viols ou tentatives de viols enregistrés augmentent de 31 %, soit une progression encore plus forte que celle observée en 2020 (+27 %). « En deux ans, le nombre de victimes de viol ou tentative de viol conjugal enregistrées par la police ou la gendarmerie a ainsi été multiplié par 1,7», note le rapport.

Les victimes de violences conjugales sexuelles enregistrées sont nettement plus jeunes que les autres victimes de violences conjugales : la moitié d'entre elles a moins de 30 ans, et 13 % moins de 20 ans contre respectivement 4 et 6 % pour les violences psychologiques et physiques. A l'instar des victimes, les mis en cause pour violences conjugales sexuelles enregistrés sont nettement plus jeunes que les profils des mis en cause pour violences physiques et pour violences psychologiques ou verbales. Ainsi, 20 % des mis en cause pour violences sexuelles enregistrés ont moins de 25 ans contre 13 % des mis en cause pour violences physiques et 10 % des mis en cause pour violences psychologiques et verbale.


« Les victimes de violences conjugales signalent rarement aux services de sécurité les faits qu’elles ont subis. Ainsi, d'après l'enquête de victimation Genese, moins d’une victime de violences conjugales sur quatre a porté plainte en 2020 »,  précisent les autorités. « Cette part est plus importante pour les violences physiques (34 %) et pour le harcèlement moral (26 %), mais seulement 10 % des victimes de violences sexuelles conjugales déclarent ce type d’actes à la gendarmerie ou à la police».

Le ministère de l'Intérieur rappelle que les enquêtes "Cadre de vie et sécurité" (CVS), dite de « victimation » ne permettent d’identifier que les violences conjugales physiques et sexuelles les plus graves (viols, tentatives de viols et attouchements sexuels). En revanche, l’enquête Genese, conduite par le le Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI), permet « de connaître ces mêmes violences conjugales mais également les deux autres types d’infractions sexuelles, le harcèlement sexuel et toutes les autres agressions sexuelles ainsi que les violences psychologiques, commises par un conjoint ou un ex-conjoint ».