Malgré un contexte législatif favorable à la mise en place d’une éducation à la sexualité et à la vie affective pour les jeunes déficients visuels, très peu d'établissements et services médico-sociaux assurent cet accompagnement.

Dans le cadre du projet « Éduquer pour protéger ! L’éducation à la sexualité des jeunes présentant une déficience visuelle », deux enquêtes ont été menées pour établir la situation en matière d’accompagnement des jeunes déficients visuels sur la thématique de l’éducation à la sexualité et à la vie affective. (1) La première a été conduite auprès des professionnels des établissements et services médico-sociaux (ESMS) et la seconde auprès des adultes déficients visuels.

Premier constat : L’accompagnement institutionnel est « mal défini » et « hétérogène ». Ainsi, 63% des ESMS interrogés indiquent qu’ils n'ont pas de projet d’établissement relatif à l’éducation à la sexualité.  Et 22% répondent ne pas savoir s’il existe ou non un projet d’établissement sur cette thématique. Pourtant, l’article 7 de la loi du 2 janvier 2002 spécifie que : « L’accès à une vie affective, relationnelle, intime et sexuelle des personnes en situation de handicap est un droit garanti aux personnes accueillies et accompagnées dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESMS) ».

Seuls 7% des professionnels déclarent se sentir « tout à fait compétents » pour réaliser ce type d’accompagnement.

Plus de six professionnels interrogés sur dix déclarent avoir déjà eu à intervenir sur des problématiques en lien avec la sexualité, mais dans 8% des cas, ils admettent que leur établissement ne met aucune ressource à leur disposition concernant cette thématique. Seuls 7% des professionnels déclarent se sentir « tout à fait compétents » pour réaliser ce type d’accompagnement tandis que 38% souhaitent des formations et 38% du matériel adapté à disposition.
Concernant les thématiques sur lesquelles ils souhaiteraient être sensibilisés, les professionnels des ESMS citent le consentement en première position, suivie par les problématiques de genre, la rencontre/séduction, la prévention des maladies sexuellement transmissibles et enfin l’aspect biologique.

Du côté des adultes présentant une déficience visuelle, 59% indiquent avoir reçu une éducation à la sexualité et à la vie affective à l’adolescence.  Seulement dans 4% des cas, celle-ci a été réalisée (pour tout ou partie) par la structure médico-sociale qui les accompagnait.

Les ESMS disposent d’une expertise concernant la déficience visuelle que les établissements scolaires ne peuvent offrir.

Aujourd'hui, les principaux acteurs de l’éducation à la sexualité sont l’école à 55% et la famille à 31%. L’importance d’un accompagnement à l’éducation à la sexualité et à la vie affective par les ESMS est pourtant largement partagée par les professionnels comme les adultes déficients visuels. « Les ESMS disposent d’une expertise concernant la déficience visuelle que les établissements scolaires ne peuvent offrir. En accord avec la législation, les ESMS doivent se saisir des questions relatives à la sexualité et à la vie affective. Cette thématique devrait être mentionnée dans chaque projet d’établissement ainsi que sa matérialisation concrète sur le terrain », insistent les auteurs de l'étude.

L'enquête met en évidence la nécessité de créer des outils adaptés tels que des livres, des objets tactiles ou des podcasts. Aujourd’hui, l’augmentation du nombre de livres traitant des questions d’éducation à la sexualité et à la vie affective pour les jeunes voyants n’a pas de répercussion sur l’accès à ces contenus pour les jeunes présentant une déficience visuelle. « La mise à disposition d’outils en 3 dimensions semble nécessaire à un accompagnement de bonne qualité sur les questions relatives à la sexualité  », souligne Mes Mains en or, association consacrée à l'édition de livres tactiles pour enfants déficients visuels.

(1) Enquêtes menées par l’association Mes Mains en or et Lætitia Castillan, psychologue et chercheuse à l’Université de Toulouse Jean Jaurès. 130 professionnels de la déficience visuelle (éducateurs, psychologue et autres) et 90 adultes déficients visuels (avec une moyenne d’âge de 33 ans) ont répondu à l’enquête.