« L'école en France peine à déjouer le rôle exercé par l'origine sociale, le sexe et l'ascendance migratoire sur les performances et les parcours des élèves », selon un rapport intitulé "Scolarités Le poids des héritages" de France Stratégie, un organisme de réflexion et de prospective dépendant de Matignon, publié le 6 septembre. Et de ces trois dimensions, c'est l’origine sociale qui, en France, pèse le plus sur les trajectoires. 

Cette étude analyse la manière dont se fabriquent les inégalités aux différentes étapes (crèche, école primaire, collège et lycée), en fonction de trois variables (sociale, migratoire et de genre), à partir des statistiques du ministère de l'Education, de l'OCDE, etc.

La petite enfance pose les fondations des inégalités de parcours.

Le poids de l'origine sociale est « massif », et ce dès l'âge de 2 ans, où « les enfants issus d'un milieu socialement ou culturellement favorisé maîtrisent davantage de compétences utiles pour l'acquisition ultérieure des savoirs scolaires » (vocabulaire notamment), constatent Johanna Barasz, Peggy Furic et Bénédicte Galtier, les autrices du rapport.

Si l'accueil en crèches bénéficie, en termes de développement, particulièrement aux enfants des catégories populaires et aux enfants d’immigrés en leur permettant de multiplier les opportunités d’apprentissage, ces enfants sont ceux qui y ont le moins accès. « Les enfants qui vivent dans des foyers à faibles revenus, ceux dont la mère a un faible niveau d’éducation ou ceux issus de l’immigration ont le plus à gagner des modes d’accueil formels, notamment collectifs comme la crèche. Les bénéfices concernent le langage, les capacités pré-mathématiques comme les capacités socio-comportementales. Or seuls 5 % des enfants de moins de 3 ans appartenant aux 20 % des ménages les plus pauvres sont accueillis en crèche, contre 22 % des enfants des 20 % des parents les plus aisés », indique le rapport. En comparaison avec les autres pays de l’OCDE, cet inégal accès selon le niveau de revenu des parents est particulièrement marqué en France.

« Même avec de bons résultats en début de scolarité, les enfants de famille modeste ont des parcours en moyenne plus heurtés, aux débouchés nettement moins favorables », avance France Stratégie. L'école primaire (maternelle et élémentaire) « constitue une étape importante de la cristallisation » des trajectoires.

Après le collège, « accélérateur des inégalités scolaires », les « inégalités dans les chances de réussite perdurent, voire se creusent au lycée ». « Non seulement les enfants des catégories populaires et les garçons passent moins souvent le baccalauréat, et en particulier le bac général, mais ils le réussissent moins bien ». Deux tiers des élèves en grande difficulté sont enfants d’ouvriers ou d’inactifs.
Enfin, l'enseignement supérieur « prolonge et cristallise les inégalités de parcours construites par un mécanisme d'accumulation ». Lorsque les enfants des catégories modestes accèdent à l’enseignement supérieur, ils intègrent en moyenne les filières les moins prestigieuses, « dont les perspectives d’emploi et de salaires sont moindres que celles privilégiées par les enfants favorisés ».

France Stratégie rappelle qu'en moyenne, un adulte né dans un milieu défavorisé gagnera 1 100 euros par mois de moins que celui qui est né dans un milieu favorisé.