Testés lors d’auditions de mineurs victimes, les chiens d’assistance judiciaire font leurs preuves. Apaisement, libération de la parole, climat de confiance : les premiers résultats sont jugés positifs. Le ministère de l’Intérieur n’exclut pas une extension du dispositif.
Constance Le Grip, députée (LR) des Hauts-de-Seine, relance le débat sur l’usage des chiens d’assistance judiciaire dans les commissariats et brigades de gendarmerie. Elle interpelle le ministre de l’Intérieur sur la possibilité de généraliser ce dispositif à l’échelle nationale.
Depuis fin 2022, la brigade de gendarmerie de Vannes expérimente la présence d’un chien d’assistance dès le début des enquêtes, notamment lors des auditions de mineurs victimes de violences intrafamiliales ou sexuelles. En un an, l’animal a accompagné plus de 150 victimes, dont 102 enfants. Les effets sont jugés positifs : réduction du stress, parole facilitée, climat de confiance renforcé.
Un dispositif encore limité
Cette expérimentation locale prolonge la convention nationale signée en février 2023 entre le ministère de la Justice, Handi’Chiens, la SPA et la Fédération France Victimes, qui encadre la présence de chiens d’assistance dans les tribunaux. Mais leur présence dans les services d’enquête reste encore rare.
« L’exercice de ces auditions est plus que délicat », estime la députée LR. Pour elle, un tel outil pourrait « réduire le stress des enfants » et améliorer la qualité des dépositions. Elle souhaite savoir si le gouvernement envisage un déploiement plus large dans les commissariats et brigades de gendarmerie.
Une généralisation à l’étude
Dans sa réponse écrite du 10 juin, le ministère de l’Intérieur confirme que des expérimentations sont en cours dans deux groupements de gendarmerie – dans le Morbihan et le Pas-de-Calais – ainsi qu’au sein d’un service de police dans ce même département. « L’initiative s’inscrit dans ce souci constant de recherche de moyens visant à faciliter les conditions d’accueil et de libération de la parole des victimes en entretien », explique le ministère.
Une évaluation en cours
Ces tests sont encadrés par la direction générale de la gendarmerie nationale. L’évaluation en cours porte sur tous les aspects : impact sur l’enfant, sur le chien, sur l’enquêteur, incidents éventuels, coût financier… Côté police nationale, le bilan de l’expérimentation – réalisé avec l’Office mineurs (OFMIN) – doit permettre d’évaluer la pertinence du dispositif.
Le ministère souligne également l’intérêt des modèles étrangers, comme le Canada, pour nourrir la pratique française. À terme, cette phase pilote devrait permettre de décider d’un éventuel déploiement national, ciblé sur les étapes les plus sensibles de l’enquête judiciaire.
Le 11 juillet, la députée Alexandra Martin (LR, Alpes-Maritimes), soutenue par plusieurs membres de son groupe parlementaire, a présenté à l’Assemblée nationale une proposition de loi visant à officialiser la présence de chiens d’assistance judiciaire auprès des victimes de violences sexuelles ou intrafamiliales, tout au long du déroulement de la procédure pénale.
Ce texte répond à un besoin urgent : permettre aux victimes – notamment les enfants – de témoigner dans des conditions moins traumatisantes. « Sa présence permet à la victime de se canaliser et de réduire les effets traumatiques des violences subies », rappelle l’exposé des motifs. Concrètement, la proposition prévoit que toute victime pourra être accompagnée d’un chien d’assistance à chaque étape de la procédure pénale. Pour les mineurs, ce droit serait automatique, sauf s’ils expriment un refus. Le recours au chien devra être proposé dès le début de l’enquête, et encadré par un décret d’application qui précisera les modalités de formation, d’habilitation et de déploiement des animaux. Ce dispositif, bien que reconnu pour ses effets positifs sur la libération de la parole, reste aujourd’hui marginal : seuls 24 chiens d’assistance judiciaire sont recensés en France en 2025, un chiffre dérisoire face à l’ampleur du phénomène. Chaque année, 160 000 enfants subissent des violences sexuelles, et moins de 25 % des victimes majeures de violences physiques osent porter plainte.
(publié le 17 juillet, mis à jour le 17 juillet)