Cette aide financière, comprise entre 250 et 1300 € et attribuée en fonction des revenus et de la situation familiale, doit permettre aux femmes victimes de violences conjugales de faire face à des dépenses urgentes en cas de mise à l’abri et de séparation.

Le décret du 24 novembre 2023 relatif à l'aide universelle d'urgence pour les personnes victimes de violences conjugales a été publié au Journal officiel du 25 novembre 2023. Créée par la loi du 28 février 2023, cette aide doit permettre aux victimes de violences conjugales « de faire face à leurs dépenses urgentes en cas de mise à l’abri et de séparation, en attendant de trouver des solutions durables, d’accéder aux aides existantes et de bénéficier d’un accompagnement social », rappelle le gouvernement dans un communiqué. Le montant de l’aide va « de 250 € à plus de 1300 € », a précisé la ministre chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, Bérangère Couillard. Il s’agit d’une « aide directe versée en trois à cinq jours par les Caisse d’allocations familiales (CAF) », a-t-elle ajouté sur France 2.

Les dispositions du décret entrent en vigueur le 28 novembre 2023.

« Aujourd'hui en moyenne une femme qui est victime de violences va faire sept allers-retours entre le moment où elle prend la décision de vouloir partir, et le moment où elle part effectivement, a expliqué, sur France Inter le 20 novembre, Aurore Bergé, la ministre des Solidarités et des Familles, Il y a la question de l'emprise dont on a beaucoup parlé, mais au-delà de ça, en vérité, c'est aussi que concrètement, partir, elle n'en a pas les moyens. Elle fait comment pour prendre un train pour aller rejoindre sa famille, comment pour avoir une première nuit d'hôtel, comment face à un imbroglio des différents services publics ? ».

Le code de l’action sociale et des familles (CASF) est modifié afin de garantir à « toute personne victime de violences conjugales» (au sens de l’article 132-80 du code pénal) le bénéfice « d’un accompagnement adapté à ses besoins » (art. L. 214-8).

Qui pourra bénéficier de cette aide ?

La personne victime de violences commises par son conjoint, son concubin ou le partenaire lié à elle par un pacte civil de solidarité et attestées par une ordonnance de protection délivrée par le juge aux affaires familiales.

Ces violences doivent être attestées par (CASF art. L 214-9 nouveau) :

  • une ordonnance de protection délivrée par le juge aux affaires familiales ;
  • un dépôt de plainte ;
  • ou encore un signalement adressé au procureur de la République.

Quelle est la nature de cette aide ?

  • L’aide sera attribuée sous forme de prêt sans intérêt lorsque le demandeur de l'aide perçoit des ressources excédant un pourcentage du montant du salaire minimum de croissance.
  • L’aide est attribuée sous la forme d'une aide non remboursable lorsque le demandeur perçoit des ressources inférieures ou égales au pourcentage fixé au SMIC.

L'aide est versée par la caisse d'allocations familiales (CAF) ou la mutualité sociale agricole (MSA) selon le rattachement du demandeur. L’aide ne peut être attribuée qu'une fois par période de 12 mois à compter de la date de la décision d'attribution.

Quelles sont les conditions d'attribution de l'aide ?

L'attribution de l'aide n'est pas soumise à conditions de ressources. Toutefois, le montant de l'aide sera calculé en fonction des revenus du demandeur ainsi que sa composition familiale.

Le décret précise les modalités d'attribution de l'aide, notamment le niveau de ressources au-dessus duquel l'aide est attribuée sous forme de prêt, le barème de l'aide en fonction des ressources et du nombre d'enfants à charge et les modalités du remboursement de l'aide attribuée sous forme de prêt.

Un décret prévoit les adaptations à Mayotte des règles applicables à l’aide universelle d’urgence pour les victimes de violences conjugales. Il tient en particulier compte du seuil de ressources au-dessus duquel l’aide est attribuée sous forme de prêt et au barème de l’aide en fonction des ressources et du nombre d’enfants à charge, ainsi qu’à l’organisme chargé du service de l’aide.

Cette aide est attribuée sous forme de prêt sans intérêt lorsque le demandeur de l’aide perçoit des ressources excédant un pourcentage du montant du SMIC net des prélèvements sociaux obligatoires, rapporté à une valeur mensuelle.

Quel est le montant de l'aide ?

Le montant de l'aide est égal au montant forfaitaire du revenu de solidarité active (RSA). Il est majoré en fonction du nombre d’enfants.

Ce pourcentage est fixé à : 

  • « 150 % pour une personne seule ;
    « 225 % pour une personne seule avec un enfant à charge ;
    « 270 % pour une personne seule avec deux enfants à charge ;
    « 330 % pour une personne seule avec trois enfants à charge ou plus ».
  • Le montant de l’aide calculé est minoré :
    « De 20% lorsque les ressources sont supérieures à 50 % du salaire de croissance précité net mensuel et inférieures ou égales à ce salaire ;
    « De 40 % lorsque les ressources sont supérieures à ce salaire et inférieures ou égales à 150 % du même salaire ;
    « De 60 % lorsque les ressources sont supérieures à 150 % du salaire précité ».

Quelles sont les modalités du remboursement du prêt ?

Il commencera 24 mois après l’attribution de l’aide, et s’effectuera en au plus 24 mensualités égales. Le bénéficiaire peur rembourser par anticipation ou en une seule fois l’aide accordée.

Le bénéficiaire pourra, au regard de sa situation financière, solliciter une remise totale ou partielle du remboursement du prêt auprès de l'organisme qui le lui a attribué, dans les conditions prévues en cas d'indus de prime d'activité.

Le délai de 24 mois peut être prolongé si une procédure pénale est en cours.

Le remboursement peut, sous certaines conditions, être à la charge de l’ancien conjoint, partenaire de pacte civil de solidarité ou concubin quand la procédure pénale engagée a donné lieu à une décision définitive demandant à celui-ci le remboursement du prêt au titre de la peine complémentaire.

Les autres mesures à venir

Le gouvernement va tester dans cinq départements un "pack nouveau départ", avec un agent de la CAF chargé « d’organiser, avec les associations locales, le départ des femmes », indique Bérangère Couillard. Élisabeth Borne a, elle, promis le 24 novembre l’examen à l’Assemblée nationale d’une proposition de loi instaurant une ordonnance de protection « immédiate ». Les associations réclament la création de 15 000 places d’hébergement dédiées aux femmes.

Le gouvernement promet également le déploiement du fichier de prévention des violences intrafamiliales (promesse de campagne du Président de la République). Ce fichier - actuellement en cours d’expérimentation - doit permettre aux acteurs de terrain, et en particulier aux forces de l’ordre, d’« améliorer leur connaissance et le suivi » des auteurs de violences conjugales, en prenant en compte « les signaux faibles », afin de garantir la sécurité des victimes.
Parmi les 244 000 victimes de violences conjugales enregistrées en 2022 par les forces de sécurité, la grande majorité des victimes sont des femmes (87%) et les mis en cause sont le plus souvent des hommes (89%).

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