Avocate au Barreau de Paris et avocat référent de l'association L'Enfance au cœur, Christine Cerrada dénonce les placements "injustifiés" d'enfants et "un système judiciaire dépendant des services sociaux".

Dans votre nouvel ouvrage "Placements abusifs d'enfants. Une justice sous influence" (Ed. Michalon), vous fustigez une protection de l'enfance qui, selon vous, dysfonctionne de A à Z. Quels sont vos constats ?

Christine Cerrada. La protection de l’enfance n’est pas assez contrôlée, pas régulée. Trop de pouvoir est donné aux travailleurs sociaux et aux structures qui mettent en œuvre les mesures même si on a l’impression que la justice soit totalement indépendante, a véritablement le dernier mot et prend ses responsabilités. En réalité, la décision de justice colle beaucoup trop aux rapports sociaux devenus tout-puissants. Les jugements entérinent en majorité leurs préconisations. Or, les rapports sociaux n’ont pas l’objectivité et la qualité qu’ils devraient avoir. Les placements ne sont plus régis par les causes légales des placements, c’est-à-dire des conditions d’éducation ou de développement psychoaffectif de l’enfant gravement compromises ou un véritable danger. Un enfant sur deux se voit placé pour des motifs insuffisants sans rapport avec la caractérisation du danger qu'exige pourtant le Code civil (article 375). Tous les jours, je vois des rapports sociaux préconiser un placement en foyer, une AEMO, une AEMO renforcée pour des raisons anecdotiques. L’idéologie des juges des enfants et des travailleurs sociaux dans chaque tribunal, répétée par le nombre de tribunaux, conduit à ouvrir à fond le robinet des mesures de placement. En fin de course, le système de la protection de l’enfance est embolisé et ne fonctionne pas.

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