La lettre de Gérald Darmanin aux agents de la PJJ suscite un mélange d’espoir et de réserve. Si la volonté affichée de privilégier la protection des enfants est saluée, les premières réactions des acteurs de terrain insistent sur l’urgence d’actions concrètes et de moyens réels pour transformer les intentions en résultats.
Anne Devreese, présidente du Conseil national de la protection de l’enfance (CNPE).

« La protection des enfants, une priorité du ministère de la Justice ? On aimerait tellement y croire. Il y a tant à faire… Des mesures concrètes sont bloquées depuis des années sur des enjeux pourtant décisifs pour la protection des enfants victimes : sécurisation du statut des administrateurs ad hoc, lutte contre la traite et l’exploitation sexuelle des enfants, généralisation des avocats d’enfants dans les procédures d’assistance éducative, déploiement des consultations médico-légales au sein des UAPED…
Recentrer l’action publique sur la protection des enfants ( au civil comme au pénal), après des années de concentration des moyens sur l’aggravation des sanctions, dans une approche essentiellement punitive de la justice des mineurs…
Ce serait un tournant, c’est sûr ! Mais aussi un investissement quand on sait combien la promotion des droits des enfants, l’accès aux soins et à l’éducation limitent durablement les coûts humains, sociaux et même financiers pour la société toute entière. »
Maxime Zennou, directeur général du Groupe SOS Jeunesse et délégué territorial aux outre-mer du Groupe SOS.

« "La place de ces enfants n’est pas en prison". Sans doute l’un des propos les plus importants tenus par Gérald Darmanin dans sa lettre aux agents de la protection judiciaire de la jeunesse qui oublie au passage de mentionner les salariés des associations habilitées qui partagent la même mission.
Contrairement aux discours ambiants, il est bien entendu que l’enfermement des enfants auteurs d’infractions à la loi pénale ne suffit pas. La peine de prison quand elle est prononcée doit durer le moins longtemps possible et être inscrite dans une stratégie éducative réparatrice qui prépare les conditions d’une sortie sécurisée orientée vers l’insertion et la prévention des réitérations.
De nombreuses alternatives à l’incarcération des mineurs ont été développées. Elles doivent être mobilisables et coordonnées sur l’ensemble des territoires dans l’hexagone, comme dans les outre-mer.
L’avenir dira si les annonces sont assorties d’un commencement d’exécution. Prévoir ainsi d’ouvrir 18 nouveaux établissements en 2 ans est ambitieux lorsque l’on sait que la construction d’un centre éducatif fermé peut prendre de 5 à 10 ans.
Plusieurs lois ont déjà réformé la protection de l’enfance et la protection judiciaire de la jeunesse. Elles attendent moins une nouvelle poussée d’inflation législative que les moyens d’exécuter toutes les décisions de justice.
La profession de foi enthousiaste du ministre dans la validité de la réponse éducative est appréciée. L’action éducative est protéiforme et s’incarne notamment dans les très nombreux outils de médiation éducative déployés par les éducateurs. »
La Fondation pour l’Enfance accueille favorablement l’annonce d’une ordonnance de sûreté pour protéger les enfants.
Dans son courrier adressé aux agents de la PJJ le 5 août, le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, a annoncé sa volonté de créer « une ordonnance de sûreté de l’enfant permettant au procureur de protéger sans délai un enfant face à un parent agresseur, sur signalement et en cas de danger vraisemblable ».
Cette mesure, visant à renforcer la protection des mineurs victimes, répond à une demande de longue date portée par les associations de protection de l’enfance. À ce titre, la Fondation pour l’Enfance « salue cette annonce », soulignant qu’elle correspond à une attente forte du secteur.
« Notre Fondation mène un plaidoyer pour la création d’une telle mesure de protection des enfants », rappelle-t-elle dans un post sur LinkedIn, notamment au sein du Collectif pour l’Enfance et de la Coalition pour une loi-cadre intégrale contre les violences sexuelles faites aux femmes et aux enfants.

Toutefois, la Fondation reste prudente : « Nous resterons attentifs au calendrier prévu et aux modalités de cette ordonnance », conclut-elle, insistant sur la nécessité d’une mise en œuvre rapide et efficace afin d’assurer la sécurité des enfants.
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