« Il est grand temps que la santé mentale des étudiants devienne une priorité pour le gouvernement », alerte une quarantaine de présidents d’université, médecins de services de santé universitaire, représentants de syndicats et d’associations étudiantes, dans une tribune publiée dans " Le Monde" le 14 juin.

Selon l’Observatoire de la vie étudiante, 43 % des étudiants présentaient des signes de détresse psychologique en 2021 (contre 23 % avant la pandémie). En dépit des mesures prises par le gouvernement, tels que les "chèques psy" et le dispositif " MonPsy",« force est de constater que le recours au soin est très faible, et que les réponses politiques au coup par coup ne suffisent pas », déplorent les auteurs de la tribune. Concrètement, seuls 4 % des étudiants en souffrance psychique ont pu consulter leur service de santé universitaire ou bureau d’aide psychologique universitaire et seuls 1 % aient fait usage des "chèques psy" débloqués par le gouvernement en 2021.

« En 2020, il y a d’abord eu neuf mois blancs avant que l’État n’agisse. Des efforts ont ensuite été faits, avec l’annonce du chèque psy et de l’embauche de 80 psychologues dans les facs, mais cela reste très insuffisant face à l’ampleur de la détresse », considère Florian Tirana, président de Nightline France.

« C’est une génération entière qui souffre en silence, des parcours de vie traversés par l’anxiété, la dépression et les idées suicidaires », insistent les signataires qui rappellent que selon le dernier rapport de Nightline France (2022), le nombre de psychologues chargés de l’accompagnement des étudiants demeure à un niveau « très faible en France, malgré des progrès réalisés cette année » . Alors qu'aux États-Unis, on compte 1 psychologue à temps plein pour 1 346 étudiants ; au Canada, 1 psychologue pour 2 323 étudiants ; en Australie, 1 psychologue pour 4 471 étudiants ; en Autriche, 1 psychologue pour 6 428 étudiants; en France, un psychologue universitaire doit répondre aux besoins de à 14 889 étudiants en moyenne, « soit dix fois plus que les recommandations internationales (International Accreditation of Counseling Services) ».

Malgré le recrutement de 80 psychologues, les services de santé universitaires sont encore et toujours saturés par la disproportion entre l’offre et la demande, comme en témoignent les effectifs d’un équivalent de temps plein travaillé (ETPT) de psychologue universitaire pour près de 14 889 étudiant·e·s, soit dix fois moins que les recommandations internationales qui prévoient un ETPT pour 1 000 à 1 500 étudiant·e·s

Structurer une offre de soin gratuite, graduelle et accessible à tous

« Il est impératif de mettre en œuvre, rapidement et pour le long terme, une stratégie nationale de santé mentale étudiante, pilotée par le gouvernement. Cette stratégie devra renforcer considérablement les moyens accordés aux services de santé universitaire, tant en psychologues qu’en médecins, infirmiers, personnel administratif, et en locaux. Ces moyens permettront de structurer une offre de soin gratuite, graduelle et accessible à tous », insistent les signataires de la tribune.

Et de poursuivre : « Le gouvernement doit prendre ses responsabilités en débloquant des fonds dès la rentrée prochaine ». Ils demandent de transformer les services de santé universitaire en « services de santé étudiants », c'est-à-dire en guichet unique ouvert à tous, notamment aux « étudiants en formation technique, écoles paramédicales, sociales, d’ingénieurs ou de commerce », qui n’ont aujourd'hui pas accès à ces services.